Reclassement de l'anniversaire de Marguerite R-Jones
Préambule : Les personnages de la série ne m’appartiennent pas. Ils sont la propriété exclusive de : Donald P. Bellisario & Don McGill. Je ne tire aucun bénéfice de leur mise en situation dans cette fiction.
Genre : Romance – Songfic
Personnages : Tony/Ziva
Résumé : Tony va-t-il réussir à dire à son équipière ce qu’il ressent vraiment pour elle ? Et s’il le fait, comment réagira-t-elle ?
Les mots bleus
Il respirait l’air de l’océan à pleine poitrine et s’enivrait du petit vent frais qui venait jouer dans ses cheveux. Il sentait les battements de son cœur s’accélérer au fur et à mesure qu’il repensait à ce qu’il préparait.
Etait-ce bien le moment ? Devait-il enfin franchir ce pas qu’il s’interdisait depuis plus de deux ans ? Que ferait-il si elle le rejetait ?
Elle était restée seule à protéger l’employée de la mairie, traumatisée par son agression et incapable d’accepter la proximité d’un homme. Il sourit en se demandant si Ziva était la femme idéale pour en amener une autre à s’épancher. Toute sa formation au MOSAD lui avait appris à être aussi dure qu’un homme, plus peut-être. Toutefois, il savait qu’elle cachait aussi des trésors de tendresse sous ses abords austères. Lorsque chaque jour de plus est un cadeau de la vie, lorsque vous ne savez pas si vous verrez le soleil se lever le lendemain, il est difficile d’ouvrir votre cœur.
Et pourtant, il aurait aimé être sûr, pouvoir lire en elle, parce qu’il ne détestait rien tant que se lancer au hasard.
Mais sa décision était prise.
Il est six heures au clocher de l'église
Dans le square les fleurs poétisent
Une fille va sortir de la mairie
Comme chaque soir je l'attends
Elle me sourit
Il faudrait que je lui parle
A tout prix
Il y avait maintenant dix jours qu’ils étaient arrivés à Newport pour cette enquête, ce marine assassiné auprès duquel on avait retrouvé cette femme, violée et inconsciente, mais pas gravement blessée. Sitôt qu’elle était sortie, Ziva s’était attachée à elle : elle était un témoin, sa culpabilité ayant été définitivement écartée par les preuves médico-légales. Et en tant que tel elle était en danger parce que le tueur l’avait crue morte et n’aurait de cesse de s’en prendre de nouveau à elle. Même si la mémoire lui faisait défaut, elle pouvait se souvenir à tout moment et vraisemblablement le coupable ne lui laisserait pas cette chance : le risque était trop grand.
Alors tous les jours ils se quittaient au seuil du bâtiment municipal et il allait mener son enquête : pour eux l’assassin était toujours là, tapis dans l’ombre, attendant le meilleur moment pour frapper de nouveau. Gibbs et MacGee travaillaient sur une autre enquête quelque part dans le Maryland.
Sur ce coup-là, c’était juste eux deux et jamais il n’avait été aussi heureux d’être en tandem sur une mission.
Parfois, ses investigations terminées, il se permettait de baguenauder un peu dans les rues. C’est ainsi qu’il avait trouvé le petit objet qu’il serrait nerveusement au fond de sa poche, tentant de construire un discours cohérent. Lui, le beau parleur, l’incorrigible bavard capable de bavarder des heures de tout et surtout de rien, il n’était pas sûr des mots qu’il devrait dire.
Je lui dirai les mots bleus
Les mots qu'on dit avec les yeux
Parler me semble ridicule
Je m'élance et puis je recule
Devant une phrase inutile
Qui briserait l'instant fragile
D'une rencontre
D'une rencontre
Il y avait longtemps déjà qu’il savait que son cœur battait pour elle, longtemps qu’il cachait ses sentiments sous les moqueries, les petites piques assassines, la colère parfois.
Au départ ils s’étaient dressés l’un contre l’autre, comme des animaux sauvages jaloux de leurs territoires et qui ne veulent pas qu’on vienne y empiéter. Et puis, petit à petit, ils avaient appris à se faire confiance, à s’apprécier. Bien sûr il y avait eu des crises : la mort de celui qu’elle aimait, celui qu’il avait tué, son départ, sa capture, la manière dont ils l’avaient libérés, au péril de leur propre vie… Puis il y avait eu tous ces mois d’incertitude avant qu’elle ne prenne sa décision : elle revenait, définitivement.
Et ce qui paraissait impossible entre un Américain, agent du NCIS et une Israélienne, agente du MOSAD, était soudain devenu envisageable entre Tony Di Nozzo, troisième génération d’américains d’origine italienne et Ziva David, américaine nouvellement naturalisée, d’origine israélienne.
Oui, tout était désormais possible s’il savait lui ouvrir son cœur.
Je lui dirai les mots bleus
Ceux qui rendent les gens heureux
Je l'appellerai sans la nommer
Je suis peut-être démodé
Le vent d'hiver souffle en avril
J'aime le silence immobile
D'une rencontre
D'une rencontre
Finalement il n’avait pas parlé : lorsqu’elle était sortie ce soir-là de la mairie, escortant leur témoin, l’homme était là qui les attendait.
Ziva avait fait son devoir, comme toujours, comme on le lui avait inculqué depuis l’enfance, sans se préoccuper d’elle. Elle devait protéger le témoin, elle l’avait fait et c’est elle qui était tombée sous les balles avant que le tueur ne s’effondre sous celles de Tony.
Il se souvenait de sa peur, de ses larmes tandis qu’il tenait son corps ensanglanté dans ses bas, sentant sa vie fuir sous ses doigts crispés sur l’estomac, alors que le témoin poussait des cris hystériques qui lui avaient donné envie de la gifler, juste pour la faire taire, pour qu’elle s’arrête. C’était Ziva qui était au sol, qui mourait contre lui ! Elle, elle était sauve et désormais elle n’aurait plus rien à craindre grâce à l’abnégation de la femme à laquelle il répétait inlassablement :
- Ne me laisse pas Ziva… Bats-toi ! Tu n’as pas traversé tout ce que tu as traversé pour te laisser avoir par un tueur à la petite semaine ! Ah il serait beau l’ex-agent du MOSAD s’il laissait un minable gagner ! Bats-toi ! Tu n’as pas intérêt à me faire ce coup-là !
Et elle s’était battue, avec toute la hargne qu’il lui connaissait, étonnant les médecins par sa vitalité, déjouant tous leurs pronostics.
Deux mois s’étaient écoulés durant lesquels il avait toujours été à ses côtés, mais sans rien dire : il ne voulait pas profiter de son état de dépendance, de fragilité. Forcément elle avait baissé ses défenses, sa lutte pour la survie lui prenait toute son énergie, elle n’en avait plus pour se montrer forte, apparemment insensible, sarcastique… Ziva quoi…
Et il voulait lui donner la possibilité de dire non ! En ce moment il savait qu’elle aurait du mal parce qu’elle lui était tellement reconnaissante de ce qu’il avait fait pour elle. Il refusait qu’elle confonde cette reconnaissance avec de l’amour. Il ne voulait pas d’un sentiment mièvre, frelaté, tiède… Si elle devait répondre à ses sentiments, il fallait que ce soit avec la même fièvre, la même ardeur, la même passion que ce que lui-même éprouvait.
Ils étaient des combattants, des viveurs, des alphas ! Rien de ce qui était en demi-teinte ne pouvait leur convenir !
Elle avait repris le travail, une quinzaine de jours auparavant, clouée derrière un bureau et déjà elle en enrageait. Trois jours avant il avait été chargé de convoyer un prisonnier vers l’état où il était extradé. Trois jours sans la voir, sans lui parler, sans admirer son sourire… il avait l’impression que c’était une éternité.
Mais le train arrivait en gare et il savait qu’elle serait là à l’attendre. Certes il lui avait dit de ne pas le faire étant donné l’heure tardive de son retour, mais elle avait soutenu qu’elle allait bien, qu’il était hors de question qu’il prenne un taxi et qu’elle était encore capable de venir chercher un ami qui rentrait sans s’effondrer ! Il avait souri à la colère fictive dans sa voix, entendant d’autres mots sous ceux qu’elle prononçait.
Peut-être que le moment était venu…
Il n'y a plus d'horloge, plus de clocher
Dans le square les arbres sont couchés
Je reviens par le train de nuit
Sur le quai je la vois
Qui me sourit
Il faudra bien qu'elle comprenne
A tout prix
- Tu es venue finalement ? Tête de mule !
- Hé ! Je suis une grande fille Tony ! Je sais ce que j’ai à faire ! Et puis de toute façon, je ne te faisais pas confiance pour retrouver le chemin de ton appartement ! Et c’est moi qui conduis !
- Pitié ! Pas ça ! Je voudrais arriver en un seul morceau.
Et tandis qu’elle roulait des yeux faussement furieux, tandis qu’il geignait, faussement apeuré, tandis que leurs taquineries habituelles fusaient, du tac au tac, ils se disaient beaucoup d’autres choses qu’eux seuls entendaient.
Je lui dirai les mots bleus
Les mots qu'on dit avec les yeux
Toutes les excuses que l'on donne
Sont comme les baisers que l'on vole
Il reste une rancœur subtile
Qui gâcherait l'instant fragile
De nos retrouvailles
De nos retrouvailles
Ils étaient arrivés à la voiture et il jeta son sac dans le coffre tandis qu’elle s’installait au volant avec un sourire victorieux.
Cette bataille-là il était prêt à la perdre : il en avait une autre à livrer qui était bien plus importante à ses yeux.
Et tandis qu’ils roulaient vers son appartement, il glissa la main dans la poche de son manteau : il était là l’objet, depuis deux mois…
Et ce soir… Ce soir…
Je lui dirai les mots bleus
Ceux qui rendent les gens heureux
Une histoire d'amour sans paroles
N'a plus besoin du protocole
Et tous les longs discours futiles
Terniraient quelque peu le style
De nos retrouvailles
De nos retrouvailles
Elle avait accepté de monter, sans façon, sans arrière pensée. Après tout, il l’avait hébergée en tout bien tout honneur durant plus d’un mois, lorsqu’elle était sortie de l’hôpital, encore très faible, et que son propriétaire lui avait signifié qu’elle avait omis de reconduire son bail. Elle avait eu beau lui dire qu’elle aurait eu bien du mal à le faire avec des tuyaux branchés sur tous le corps et une machine qui l’aidait à respirer, l’homme n’avait rien voulu savoir.
C’était elle qui avait empêché Tony de faire un sort au sale type, lui disant qu’il ne méritait même pas qu’on lui fasse cet honneur, et elle avait accepté de s’installer dans sa chambre d’amis, un peu méfiante au début, mais trop épuisée pour chercher autre chose. Ce n’était que la semaine précédente qu’elle avait retrouvé le « chez elle » dont elle avait besoin, à quelques rues de là, malgré la suggestion de Tony de rester encore un peu.
Elle ne pouvait pas s’imposer à lui indéfiniment. Elle le savait homme à femmes, multipliant les conquêtes et elle avait l’impression de l’empêcher de vivre sa vie. Depuis qu’elle s’était installée, il n’avait pas découché une fois et n’avait jamais ramené personne non plus. Elle ne voulait pas y voir autre chose que le respect d’un collègue pour un autre, et pourtant elle ne pouvait pas s’empêcher d’espérer.
Et ce soir, il y avait eu cet éclat dans le regard tandis qu’il l’invitait à monter prendre un café, cette nervosité dans sa voix, imperceptible à toute personne moins bien entraînée qu’elle à déceler chaque faille dans le comportement de ses interlocuteurs.
Maintenant ils étaient là, face à face : il avait plongé la main dans la poche de son manteau et il la regardait, semblant chercher ses mots.
Je lui dirai les mots bleus
les mots qu'on dit avec les yeux
Je lui dirai tous les mots bleus
Tous ceux qui rendent les gens heureux
Tous les mots bleus
Ils étaient blottis l’un contre l’autre et ils se demandaient comment ça n’était pas arrivé avant, pourquoi ils avaient laissé passer tant de temps !
Lorsqu’il avait sorti de l’écrin le collier d’or fin, joliment ciselé, au bout duquel pendait une petite étoile de David parsemée de diamants, elle avait pensé que son cœur allait s’arrêter de battre. Elle avait déjà eu cette sensation une fois, alors qu’elle était dans ses bras et cherchait sa respiration tandis que le sang s’écoulait hors de son corps. Pourtant, à cet instant, elle était debout, et elle regardait son air presque intimidé tandis qu’il lui disait ces mots qu’elle désespérait d’entendre de sa bouche.
Elle ne l’avait pas quitté des yeux une seconde alors qu’il laissait enfin parler son cœur pour pouvoir toucher son âme. Il avait pu lire dans ses prunelles mille expressions qu’il n’y avait jamais vues avant. Puis il était passé derrière elle pour accrocher le présent qu’elle avait caressé du bout des doigts avant de se retourner vers lui et de se fondre dans ses bras.
Ensuite… Il y avait eu ce moment hors du temps où ils avaient tous deux atteints une plénitude inconnue.
Et maintenant, épuisés mais heureux, ils savaient : ce n’était pas arrivé avant parce que le moment n’était pas encore venu.
Mais désormais il était là et ils avaient bien l’intention de le faire durer toute leur vie.
FIN
Chanson de Christophe