Comme chacun le sait ici, je ne suis pas une inconditionnelle du couple Don/Charlie, préférant de loin leur relation fraternelle à une éventuelle relation amoureuse. Mais comme Sam, elle, adore ce couple, je lui avait offert ceci l'an dernier.
Et rassurez-vous, ça y est, j'ai fini mon reclassement, je vais cesser de vous inonder de songfics...
Préambule :
Les personnages de la série ne m’appartiennent pas. Ils sont la propriété exclusive de : Cheryl Heuton & Nicolas Falacci. Je ne tire aucun bénéfice de leur mise en situation dans cette fiction.
Personnages : Don/Charlie
Genre : P.O.V. – Songfic
Résumé : Don pense à sa relation avec son frère.
Mon frère
On ne choisit pas sa famille.
Combien de fois se l’était-il répété cette banalité ? Combien de fois s’était-il demandé ce qu’il aurait fait s’il avait eu le choix ? Combien de fois avait-il rêvé d’un monde où il redeviendrait le fils unique, le seul, celui sur lequel repose tous les espoirs de ses parents, celui qu’on cite fièrement en exemple dans les fêtes de famille ?
Juste celui qu’il avait été, durant presque cinq ans, durant ces cinq années bénies où tout gravitait autour de lui, où les conversations des dîners de famille tournaient bien souvent autour de lui, le premier enfant sur lequel on s’extasiait sur tout et n’importe quoi.
Combien de fois avait-il regretté ces cinquante-huit mois parfaits où il concentrait l’attention de tous, comme l’être exceptionnel qu’il se sentait alors ?
Et pourtant… En cet instant, il ne pouvait pas imaginer la vie sans ce frère qui était apparu un jour dans son univers, le bouleversant à jamais.
Bien-sûr qu'un jour s'en va pour l'un et pour l'autre s'en vient
Bien-sûr les étoiles se meurent quand le ciel s'éteint
C'est notre amour qui n'aura jamais de lendemain
Mon frère
De leur enfance commune, il avait des clichés, comme un kaléidoscope tantôt heureux, tantôt insupportable.
Cet amour immense qu’il avait ressenti la première fois qu’il avait vu le petit visage chiffonné, et cette responsabilité infinie qui était alors devenue la sienne. Désormais il était un grand frère et son devoir était de protéger celui qui venait d’apparaître dans sa vie.
Puis il y avait eu tant de rires aux premiers sourires, aux premiers mots, aux premiers pas maladroit.
Petit frère… il avait tellement de choses à lui montrer, à lui offrir, à lui apprendre.
Déception cruelle : le petit frère n’avait pas besoin de lui pour apprendre quoi que ce soit… Le petit frère était bien plus intelligent qu’il ne serait jamais.
Et son monde s’était écroulé.
Bien plus qu'un monde qui s'ouvre à l'un et pour l'autre chavire
Bien plus qu'une mer qui supplie quand la source est tarie
C'est tout notre amour qui s'éloigne des rives et se perd
Mon frère
Le temps de l’enfance s’était envolé, la sienne trop vite dissoute dans l’attention qui gravitait désormais quasi- exclusivement autour de Charlie. Il avait appris à se débrouiller seul, sans l’aide de personne, sachant qu’il ne compterait jamais autant que ce petit génie.
C’est petit à petit qu’il avait commencé à détourner ses yeux et son cœur de lui. Il refusait de voir comme son cadet l’idolâtrait.
Quelle ironie !!! Tout le monde s’extasiait devant ses prouesses, oubliant l’aîné. Et le seul être qui le voyait, lui, Don, comme une personne exceptionnelle, était justement celui qui avait tout saccagé sur son passage.
Il savait que ce n’était pas sa faute : Charlie n’avait pas choisi d’être différent. Mais le fait est que son existence même l’avait relégué à un rang d’insignifiance que rien de ce qu’il entreprenait ne semblait jamais devoir le faire quitter.
Tout s'oublie
Chacun avec sa peine
Que le temps nous reprenne
Les souvenirs
D'un frère
L’adolescence était venue avec ses tourments, ses angoisses, ses errances… Et insensiblement ils s’étaient éloignés l’un de l’autre.
Comment peut-on, à dix-sept ans, supporter que son jeune frère soit admis dans la même classe que soi ? Comment peut-on accepter de passer pour un imbécile aux yeux de personnes qui ne voient que les apparences ? Comment peut-on tolérer que rien de ce qu’on fait ne vous rende jamais cette place de premier qui vous revenait de droit ?
Un mur de silence et d’incompréhension les avait alors séparés, qu’il avait pensé que plus jamais rien n’abattrait.
Charlie était parti pour Princeton avec leur mère, lui était resté avec leur père.
La déchirure était consommée, non seulement entre les frères, mais, semblait-il entre les parents aussi.
Pourrait-il raisonnablement un jour pardonner à son frère cette ultime tragédie : la séparation de leurs parents ? Désormais deux maisons, deux états…
Il avait fini de grandir sans sa mère, et aujourd’hui encore le vide restait béant de tout ce qu’il n’avait pas partagé avec elle.
Chacun avec sa peine
Que le temps nous apprenne
A nous aimer
En frère
Contre toute attente Margaret et Alan s’étaient retrouvés. Mais les frères étaient restés étrangers l’un à l’autre. Leurs mondes étaient trop disjoints, trop inconciliables pour qu’ils puissent se rapprocher. Ils vivaient dans deux univers parallèles qui semblaient ne jamais pouvoir se croiser.
Ils avaient cheminé, chacun sur son chemin, se perdant de plus en plus. Le seul lien entre eux désormais c’était leurs parents et, de loin en loin, ils se retrouvaient ensemble autour de la table familiale, dans cette maison qui les avait vus grandir.
Le silence entre eux était alors assourdissant. Ils n’avaient plus rien à se dire. Et quand ils se parlaient, c’était la plupart du temps pour s’agresser verbalement. Ils savaient, l’un comme l’autre, que cette situation faisait souffrir leurs parents, mais ils ne pouvaient pas s’en empêcher. Ils étaient partis trop loin l’un de l’autre, étaient trop fier pour faire le premier pas qui les aurait rapprochés…
Certes ils étaient frères… Mais ils n’avaient plus rien en commun.
Bien-sûr que la terre est brûlée quand la pluie l'oublie
Bien-sûr que tout est cri puisqu'on se l'ait jamais dit
Bien-sûr l'amour, puisqu'il ne peut plus grandir, s'enterre
Mon frère
Et le destin avait frappé de nouveau : Margaret était tombée malade et il était rentré à Los Angeles, abandonnant tout ce qu’il avait bâti à Albuquerque, sans se poser de questions.
Sa famille avait besoin de lui, il n’avait pas d’autre choix que de revenir vers elle.
Les trois mois de la longue descente dans leur enfer l’avaient encore plus éloigné de son frère, même si cela aurait pu sembler impossible.
Comment pardonner la lâcheté, l’inconscience, l’indifférence ?
Leur mère lui avait tout donné : elle avait abandonné son emploi, sa maison, son époux et son fils aîné pour l’accompagner lorsqu’il était entré à l’université, trop jeune pour supporter la séparation. Et en échange qu’obtenait-elle alors qu’elle dérivait lentement vers sa dernière escale ? Des tableaux remplis d’équations absconses et un refus systématique de venir la voir, ne serait-ce que quelques minutes.
Et lors de leurs moments ensemble, juste lui et elle, comme lorsqu’il était encore l’enfant unique qu’il aurait aimé rester, c’était encore de Charlie qu’elle parlait, le suppliant de le comprendre, de le protéger, de le consoler.
- Ce n’est pas juste pour toi chéri, je le sais… Mais tu es le seul qui saura le faire réagir. Je te le confie, lui et ton père.
Cette phrase, elle la lui avait soufflée alors que déjà la mort l’enserrait dans ses griffes glacées. Puis elle avait fixé sur lui ses yeux tourmentés tandis que sa voix frêle se faisait pressante :
- Promets-moi mon ange… Promets-moi que tu t’occuperas de ton frère et de ton père.
Il avait promis, bien sûr. Qu’aurait-il pu faire d’autre ? Sa récompense était venue immédiatement par le soulagement qui s’était inscrit sur les traits de sa mère tandis qu’elle murmurait :
- Merci. Je savais que je pouvais compter sur toi. Je t’aime mon amour.
Et puis plus rien… Rien que ce vide immense qu’il ne pouvait partager avec personne, parce que, les deux êtres qui devaient le ressentir aussi avaient besoin de lui pour se relever.
Bien plus qu'un dernier regard peut décider d'une vie
Bien plus que cette fin d'espoir que le courant charrie
C'est un amour qui ne trouvera pas de rivière
Mon frère...
Un fossé… Un gouffre à combler pour une promesse qu’il ne pouvait pas ne pas faire.
Mais tant d’incompréhension, tant de rancœur, tant de regrets, tant d’amertume…
Et pourtant ils avaient réussi, ils l’avaient bâti ce pont entre leurs mondes.
Oh ! Ca ne s’était pas fait en un jour bien sûr, et il y avait encore ces moments de tension palpables entre eux. Ils étaient aussi maladroits l’un que l’autre pour ce qui concernait l’expression des sentiments.
Pourtant ils avaient fini par vraiment se rapprocher et par se comprendre. Il avait retrouvé le petit frère admiratif, celui qui aurait tout donné pour un regard, un compliment de ce frère aîné qu’il vénérait, qui aurait fait n’importe quoi pour lui. Et de son côté il avait découvert un homme plus fort qu’il ne croyait, avec ses doutes, ses emballements.
Evidemment, tout n’était pas toujours rose parce que leurs tempéraments, leur besoin d’avoir le dernier mot les opposaient encore bien souvent. Mais désormais ils marchaient sur la même route.
Tout s'oublie
Chacun avec sa peine
Que le temps nous reprenne
Les souvenirs
D'un frère
Charlie…
Il avait redécouvert cet amour qui n’avait jamais vraiment déserté son cœur. Il avait simplement été masqué par les aléas de la vie. Mais il était là, plus fort et plus doux jour après jour.
Il avait réendossé avec un plaisir infini son costume de super-frère : celui à qui on peut tout demander, celui qui est là pour vous guider, vous protéger…
Et petit à petit ils avaient réécrit l’histoire. Ils avaient appris à se regarder, à s’écouter, à se comprendre.
Et petit à petit ce besoin qu’ils avaient l’un de l’autre avait grandi et grandi encore jusqu’à exploser dans ces mots, dans ces gestes qu’ils pensaient n’avoir pas le droit de dire, pas le droit d’esquisser.
Chacun avec sa peine
Que le temps nous apprenne
A nous aimer
En frère
L’amour…
Insensiblement ils avaient glissé de cette indifférence l’un envers l’autre à cette nécessité de se côtoyer, de se parler, de se voir, de se toucher…
Leur relation était passée du néant à l’absolu.
Leurs chemins s’étaient rejoints pour ne plus faire qu’un où aucun d’entre eux ne serait plus jamais seul. Désormais ils savaient que leur raison de vivre était l’autre, et que, peut-être, cette distance qui les avait si longtemps éloignés, elle leur avait juste été dictée par l’instinct, par cette peur de briser les tabous.
Se pouvait-il vraiment qu’aujourd’hui ils aient franchi la barrière instaurée par la société ?
Puisqu'on ne sera toujours
Que la moitié d'un tout
Puisqu'on ne sera jamais
Que la moitié de nous
Mon frère...
Que diraient les autres s’ils savaient ? Leur père ? Leurs amis ?
Qui pourrait comprendre cet élan alors qu’eux-mêmes ne pouvaient toujours pas expliquer ce qui les avait inexorablement amenés à cet instant ?
Il aurait dû, bien sûr, lutter plus longuement, trouver les mots pour convaincre Charlie de leur erreur. C’était lui le grand frère, le protecteur, le raisonnable. C’était à lui de guider les pas de son cadet, de lui éviter les erreurs, les dangers.
Mais il n’avait pas su.
Il avait suffi de ce regard, celui qui réclamait son attention, de cette moue sur les lèvres tant aimés, de cette brume dans les yeux sombres et il avait abdiqué. Sans doute parce que le désir de Charlie répondait au sien.
Sans doute parce que, de toute éternité, ils étaient destinés à se retrouver là, à ce moment précis, avec les mêmes gestes, les mêmes mots…
Parce qu’ils étaient la moitié d’un même tout et qu’ils n’auraient jamais été entiers l’un sans l’autre.
Ils auraient vraisemblablement bien des combats à mener, bien des démons à vaincre. Mais l’un près de l’autre ils étaient invincibles.
Bien-sûr que rien ne pourra jamais nous l'enlever
Bien plus que tout ce que la vie peut nous accorder
L'amour sera toujours cette moitié de nous qui reste
A faire
Mon frère
Un mouvement à ses côtés arracha Don à ses pensées.
Il tourna la tête et sourit à la vue de Charlie, les yeux embrumés de sommeil, qui regardait autour de lui, un peu désorienté. Et puis soudain, le génie se souvint de cette soirée, de cette nuit, de ce partage…
Et il plongea ses yeux dans ceux de son frère pour y lire les mêmes doutes, les mêmes questions mais surtout le même amour qu’il y avait au fond des siens. Pas de regrets, pas de remords : le sort avait décidé pour eux et rien ne pourrait plus jamais les séparer.
Cette nuit, ils étaient nés ensemble et même s’ils devaient se cacher aux yeux de tous, il leur suffirait de se ressourcer l’un contre l’autre pour avoir la force de défier le monde entier.
Charlie se pelotonna contre son frère, s’enivrant de son odeur et de sa chaleur. Il posa sa tête sur la poitrine de son aîné tandis que celui-ci l’enlaçait tendrement. Il entendait le cœur de Don battre au même rythme que le sien et il savait qu’il était juste là où il devait être, là où était sa place depuis le jour de sa venue au monde.
- Je t’aime Don, murmura-t-il d’une voix encore enrouée par les cris qu’il n’avait pu retenir quelques heures auparavant.
Et son cœur se gonfla de tendresse lorsque son aîné lui susurra d’une voix tout aussi fatiguée :
- Je t’aime aussi Charlie.
Leurs mains se joignirent et leurs doigts s’enlacèrent tandis qu’ils savouraient l’instant présent : l’un de ces moments parfait où l’on sait qu’on est arrivé au bout de sa quête et que, quel que soit le prix à payer, rien ne nous fera jamais regretter cette seconde où tout est enfin à sa place.
FIN
Chanson de Pascal Obispo (les 10 commandements)